Andréanne Marquis : la mode à sa façon


Andréanne Marquis rêvait de mode simple et accessible. En juillet 2015, la jeune femme, native de l’Île-Verte dans le Bas-Saint-Laurent, qui n’avait aucune formation universitaire en gestion d’entreprise, a fondé la boutique en ligne Womance dans son appartement à Montréal. L’année suivante, elle a déménagé à Québec, où l’entreprise allait prendre son véritable envol.

Depuis, l’entreprise s’est taillée une place dans l’univers de la mode féminine québécoise, avec des ventes web florissantes, une tournée de boutiques éphémères, une gamme d’accessoires et deux boutiques permanentes dans la Vieille Capitale.

« Nos vêtements ne sont pas basés sur les grandes tendances. Ce qui les distingue, c’est la qualité et le confort. On les fait pour les femmes qui veulent se sentir bien et belles sans nécessairement être extras. L’accessibilité, c’est ce qui distingue la mode québécoise », raconte la fondatrice. L’accessibilité passe également par la décision de Womance de rendre disponible une grande gamme de tailles – de XXS à 3XL. En tant que femme, elle considère qu’il « ne faut pas laisser tomber » les femmes qui ont de la difficulté à trouver des vêtements beaux et confortables en raison de leur gabarit.


ANDRÉANNE MARQUIS

© Sonia Guertin

UNE ENTREPRISE VERTE ET ENGAGÉE

L’inflation a poussé l’entreprise à repenser certains plans d’expansion, mais Andréanne Marquis considère que l’achat de nouveaux vêtements reste un « besoin primaire » et un investissement porteur de confiance en soi. En février 2021, Womance a lancé une plateforme en ligne permettant aux clientes de revendre leurs vêtements Womance en échange de cartes-cadeaux. La plateforme d’économie circulaire, qui a été utilisée 5 000 fois au cours de sa première année d’existence, permet à Womance de fidéliser sa clientèle tout en luttant contre la surconsommation et en offrant ses vêtements aux clientes ayant des plus petits budgets.

Consciente de la volonté de ses clientes à faire de bons gestes pour l’environnement, Andréanne Marquis a également lancé, en octobre dernier, une entreprise de cosmétiques sans cruauté et sans produits animaux, Sans Façon, la « petite sœur » de Womance.

En tant qu’entrepreneure dans le monde postpandémique, Andréanne Marquis fait face à des difficultés sur le plan de l’approvisionnement. « On crée [les vêtements] ici, mais on produit la majorité de notre inventaire outre-mer, que ce soit à Bali [Indonésie], en Italie ou ailleurs », explique la fondatrice. « Les délais sont vraiment plus longs qu’avant. »

Elle considère que l’industrie a fait beaucoup au cours des dernières années pour se débarrasser de la réputation peu reluisante de la « fast fashion », environnementalement et socialement destructrice. Womance collabore avec des importateurs qui sont chargés de trouver des fournisseurs qui respectent certaines demandes quant aux pratiques écologiques et aux conditions de travail des employés. L’entreprise travaille présentement à établir des partenariats avec différentes manufactures qui ont la certification Fairtrade Canada. La fondatrice observe également que de plus en plus d’usines adoptent des façons de faire écologiques – par exemple, la récupération d’eau de teinture – et en parlent.

Au cours des cinq ou six dernières années, dans le monde de la mode, Andréanne Marquis a constaté une grande évolution vers le développement durable et la responsabilité sociale, portée par le pouvoir d’achat grandissant d’entreprises engagées comme la sienne.

L’entreprise est aussi socialement engagée. Womance appuie plusieurs organismes à but non lucratif dans la ville de Québec, dont MIELS-Québec, qui soutient les personnes atteintes de VIH, Moisson Québec et des centres jeunesse. Autour de Noël, les employés font plusieurs centaines de boîtes à lunch pour distribuer aux personnes en situation d’itinérance. « On essaie d’aider à notre façon des organismes qui ont peut-être moins de glamour et de visibilité. »

« On crée ici, mais on produit la majorité de notre inventaire outre-mer, que ce soit à Bali, en Italie ou ailleurs. »

Pour ce qui est de la pénurie de main-d’œuvre, elle réussit à passer au travers en fidélisant ses équipes,

en faisant la promotion de l’équilibre travail-vie, en améliorant les avantages sociaux et en favorisant les implications sociales et l’esprit d’équipe.

Andréanne Marquis note que l’industrie de la mode féminine au Québec est encore dominée par des hommes plus âgés ou avec quelques chefs d’entreprise plus jeunes, mais qui ont hérité d’une entreprise ou baigné dans le monde des affaires. Elle n’a ni MBA ni un parent PDG. Elle envisage une expansion vers Montréal, et rêve de voir Womance rayonner à l’échelle pancanadienne, comme son voisin, la Maison Simons. Avec un plan solide, une culture saine et une équipe – à forte majorité féminine – qui commercialise la sorte de vêtements qu’elles-mêmes se voient porter, Womance se démarque dans le monde de la mode québécoise à sa façon.

 
RUBY PRATKA