Fin de session à Québec


13 juin 2023 - Depuis 2013, plusieurs comités se sont penchés sur l’évaluation de la juste indemnisation à verser aux députés provinciaux. Avant la fin de la session, et malgré les critiques, le gouvernement caquiste a réussi à faire adopter une loi en faveur de la hausse des salaires des élus à l’Assemblée nationale. On a vu également Bernard Drainville, ministre de l’Éducation, pleurer en ondes, tandis que la démission d’Éric Caire a été réclamée face à une marche arrière sur le projet du troisième lien autoroutier entre Québec et Lévis. Le gouvernement du Québec a aussi mis en place une ligne téléphonique pour le signalement des inconduites sexuelles à l’école Devant les catastrophes naturelles qui s’enchaînent, l’équipe de François Legault tient bon. Voici l’avis de deux analystes politiques.

« Le gouvernement caquiste s’attaque à des problèmes structurels de l’État québécois et c’est très difficile de faire des changements lorsque tu rentres là-dedans. »

Pour Emmanuelle Latraverse, analyste politique principale à TVA, le gouvernement de François Legault est rattrapé par ses promesses en l’air. « Ce n’est pas qu’il fait de mauvais choix lorsqu’il prend des décisions. Mais, c’est qu’il désavoue des promesses irréalistes et qu’il savait irréalistes lorsqu’il les a faites. Ça vaut pour le troisième lien, ça vaut pour les maternelles 4 ans et ça vaut pour l’immigration. Également, le gouvernement caquiste s’attaque à des problèmes structurels de l’État québécois et c’est très difficile de faire des changements lorsque tu rentres là-dedans. »

Pour sa part, Rodolphe Husny, chroniqueur invité pour Le Devoir, constate que les députés de l’opposition ont réussi à faire reculer le gouvernement : « Les partis d’opposition qui ont peu de députés ont réussi à mettre le gouvernement sur la défensive. Le gouvernement caquiste s’en tire bien, mais il pourrait s’en tirer beaucoup mieux. On pourrait sentir qu’il est plus dans l’action plutôt que d’être en réaction. »

Des joueurs étoiles

Pour Rudy Husny, un lien affectif entre les Québécois et François Legault s’est noué pendant la pandémie. « Ce lien est solide. La gestion quotidienne des enjeux ne remet pas en cause la confiance des électeurs. » Le premier ministre peut également compter sur l’appui des membres de son parti : lors du dernier congrès de la CAQ en mai dernier à Sherbrooke, François Legault a obtenu un vote de confiance de 98,61 %.

Le tandem économique qui se noue entre le ministre des Finances, Éric Girard, et le ministre de l’Économie, de l’Innovation et de l’Énergie, Pierre Fitzigibbon, a retenu l’attention d’Emmanuelle Latraverse. « C’est un mariage qui fonctionne extrêmement bien aux commandes des dossiers économiques, et ce, même si le style de M. Fitzgibbon est cassant. Il n’y a pas de concurrence. Ils travaillent tous les deux dans les dossiers où ils excellent. »

Si le départ de Sophie Brochu à la tête d’Hydro-Québec a fait couler de l’encre, les ambitions d’autosuffisance énergétique vont se heurter aux limites opérationnelles liées à l’état des infrastructures. L’avenir énergétique de la province se jouera avec un autre duo. Manon Brouillette accède à la présidence du conseil d’administration de la société d’État, et le gouvernement pourra compter sur l’expérience de Michael Sabia, une éminence grise qui a fait ses preuves à la CDPQ. « M. Fitzgibbon n’a pas encore accouché de son œuvre. On va savoir à la fin de l’année s’il mérite une étoile ou pas lorsqu’on verra la réforme qu’il propose par rapport au mandat d’Hydro-Québec », explique Emmanuelle Latraverse.

De son côté, Rodolphe Husny trouve que le ministre de la Sécurité publique, François Bonnardel, tire son épingle du jeu malgré l’ensemble des catastrophes qui ont frappé le Québec au cours des derniers mois. « Depuis quelques mois, il gère les crises, l’une après l’autre ; inondations, verglas et feux de forêt : sa gestion est efficace avec une bonne coordination. »

Un automne occupé

Pour Emmanuelle Latraverse, la prochaine session parlementaire sera celle de tous les dangers pour le gouvernement Legault. « À l’automne, c’est la possibilité d’avoir des grèves dans le secteur public. C’est à l’automne aussi qu’on va savoir si le ministre Christian Dubé est réellement capable de faire adopter son projet de loi sur l’agence Santé Québec ; nous verrons alors quelle forme elle prendra et si son projet de loi est à la hauteur de sa promesse. Cet hiver, le gouvernement a lancé des chantiers difficiles qui aboutiront dans quelques mois. »

Manifestement, les ministres et les députés de la CAQ devront prendre quelques semaines de congé au cours de la belle saison, car l’automne risque d’être chaud.

 
Marc-André Leclerc